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Interview : Directrice artistique

12 septembre 2016

Muriel Menanteau est directrice artistique freelance depuis plusieurs années et intervenante professionnelle au sein de l'ISEFAC.

Directrice artistique

Muriel Menanteau est directrice artistique freelance depuis plusieurs années et intervenante professionnelle au sein de l'ISEFAC.

Comment en êtes-vous arrivée là ?

 

J’aime dessiner depuis mon plus jeune âge et je voulais exercer un métier en lien avec cette passion et la publicité. Mais ce projet restait assez flou. À l’époque où j'ai commencé mes études, il était difficile de trouver une école de communication et/ou de publicité comme il y en a beaucoup aujourd’hui.

J’ai donc étudié le marketing publicitaire dans une école où j’ai découvert une formation de communication visuelle en travaillant avec certains étudiants de cette discipline. C’est à partir de là que j’ai vraiment su ce que je voulais faire. Je me suis tout de suite sentie plus à l’aise avec la création pure plutôt qu’avec le marketing, secteur dans lequel je ne concevais jamais de publicité.

Dans les années 1980, la publicité était en plein boom.

 

Avec l’arrivée du numérique, votre manière de travailler a sûrement dû évoluer…

 

Totalement. J’ai fait mes études et commencé à travailler sans ordinateur. Ce n’est que quand je suis arrivée dans ma première agence que j'ai commencé à travailler avec une machine. Et là encore, la plupart des documents étaient réalisés à la main.

Mon travail a suivi le développement de l'informatique et du numérique et mes activités ont naturellement migré vers le digital.

 

Votre manière d’envisager la publicité a-t-elle évolué avec le numérique ?

 

Oui. On ne lit pas de la même manière sur internet. L’approche est très différente de celle d’un magazine ou d’une publicité télévisuelle. C’est un autre média avec d’autres codes et d’autres manières de s’exprimer.
Ce qui change, ce sont les niveaux de lisibilité et la manière de présenter le message. Il faut vraiment s'adapter au média. Sur internet, l’agence de publicité va davantage jouer sur l’interactivité et la vidéo par exemple.

 

Pourriez-vous être amenée à travailler dans d’autres domaines que la publicité ?

 

Je l’ai déjà fait. J’ai travaillé dans l’événementiel qui est un domaine attenant à la publicité dans lequel on a besoin de graphistes et a fortiori de directeurs artistiques. Chaque nouvel événement est synonyme d’une identité visuelle, d’un logo, d’une charte graphique particuliers… D’un matériel de communication à concevoir.

Pour une soirée particulière, j’ai eu à créer des fonds de scène et d’autres décors, du sol au plafond.

 Un directeur artistique peut travailler dans le domaine de la presse dans le cadre de la création de la maquette, du logo, de la charte graphique et des différentes sections du journal ou du magazine.

 L’édition enfin. À travers la mise en page du livre (beaux livres, édition jeunesse, manuels scolaires), mais aussi l’illustration en suivant la direction donnée par les auteurs et/ou l’éditeur. Cela peut également concerner la mise en page de catalogues de vente par correspondance dans tous les domaines.

 

Qu’en est-il du cliché selon lequel les directeurs artistiques sont toujours « charrette » ?

 

Cela dépend vraiment des différents caractères des directeurs artistiques. Certains aiment travailler sous la pression. Cela dépend aussi de la date à laquelle le client vous a donné le brief, de l’équipe avec laquelle vous travaillez et du temps qui vous est imparti.

Il ne faut pas oublier les phases qui précèdent la création proprement dite : la réflexion autour du concept et la recherche iconographique est primordiale. Nous sommes au bout de la chaîne et notre rythme de travail dépendra de celui des personnes qui sont à l’origine du projet. Néanmoins, la phase de réflexion du concept publicitaire du projet n’est pas incompressible. Si l’on manque de temps, il faut en chercher sur d’autres étapes.

 

Quelles sont les missions d’un directeur artistique ?

 

Assister au brief et être sûr de l’avoir bien compris pour pouvoir travailler avec toutes les données en tête et savoir vraiment ce que désire le client. Pendant ce moment, il faut savoir poser les bonnes questions pour cerner les envies du client. On ne peut pas créer sans contraintes, il faut avoir en tête des directives précises pour pouvoir travailler dans le bon cadre.

Il faut ensuite proposer quelques axes de réflexion, sous forme de croquis ou simplement d’idées pour que le client puisse nous réorienter sur son souhait.

Vient ensuite la réalisation du projet à proprement parler. Le directeur artistique va déterminer le ton graphique du document et échanger avec les personnes qui vont s’occuper factuellement du projet.

 

Y a-t-il une journée-type ?

 

On peut en trouver une, oui.

Le début de la journée commence par la vérification de la boîte mail pour établir le planning de la journée en fonction des deadlines.

Je m’attaque ensuite aux dossiers en cours. Lorsqu’il s’agit d’un nouveau projet, je passe un moment de réflexion afin de bien me l’approprier. Puis je me lance dans la création à proprement parler via des croquis ou des ébauches. Je passe également beaucoup de temps à observer, réfléchir et m’inspirer. Les gens pensent que dans ces moments, le directeur artistique ne fait rien, ce qui est évidemment faux.

J’essaie toujours de proposer au plus vite une solution au client par le biais d’un rough, d’un dessin ou d’une photo. Le but est de lui donner un aperçu de la direction que je pense donner à sa publicité. L’essentiel est de lui donner deux ou trois axes de réflexion pour lui permettre d’orienter notre travail ultérieur.

Je suis également amenée à rencontrer le client pour lui proposer mon idée. Cette étape est importante, car le directeur artistique doit réellement vendre son projet et convaincre les commanditaires d’adopter son point de vue. C’est pourquoi la phase d’appropriation du produit est importante pour pouvoir renforcer son argumentaire.

 

Sous quel statut exercez-vous ?

 

Dans une agence en tant que freelance.

 

Quelles qualités doit posséder un bon directeur artistique ?

 

Être à l’affût des nouvelles tendances visuelles, qu’il s’agisse de design, d’architecture, de typographie, de courants artistiques…

À mon sens, un bon directeur artistique doit faire preuve d’une grande curiosité intellectuelle et d’une ouverture d’esprit certaine pour pouvoir exercer pleinement sa profession. Une capacité de remise en question est très importante dans ce métier où les critiques peuvent être nombreuses. Il faut également savoir prendre du recul pour ne pas prendre les critiques trop à cœur.

Enfin, posséder un certain sens de la pédagogie est nécessaire pour pouvoir convaincre ses clients et faire adopter son projet.

 

Avez-vous des conseils pour ceux qui voudraient se lancer ?

 

Savoir se faire confiance en premier lieu. Bien entendu, cela vient avec l’expérience. Mais si vous avez une intuition, essayez de la suivre.

Il ne faut pas s’arrêter aux critiques que l’on émettra à propos de vos projets. Elles seront nombreuses et il vous faudra savoir faire la part des choses pour en tirer les éléments permettant l’amélioration du projet.

Bien que créatif, le directeur artistique a pour mission de vendre un objet et doit penser son projet en fonction de ce but. C’est la raison pour laquelle le directeur artistique se différencie de l'artiste.

Enfin, une attention particulière devra être portée à la langue française, tant sur le plan orthographique que grammatical ou syntaxique.

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